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La répression des acteurs sociaux par les Institutions: les formes nouvelles (partie II)
La fonction principale des modes traditionnels de répression des acteurs sociaux, par leurs institutions répondait essentiellement à une fonction de dissuasion. Qu'en est-il aujourd'hui?
Nous observons une démultiplication des formes de répression actuelles. Celles ci peuvent être affirmées, sous la forme de mesures disciplinaires , mais également dissimulées , en s'appuyant sur des mesures de gestion des ressources humaines. Elles ne visent plus tant à pénaliser , réprimer le contrevenant qu'à s'en débarrasser soit en l'incitant lui-même à partir, soit en l'obtenant pas différents moyens.
Elles ne visent plus (ou en tout cas, plus seulement) comme cibles privilégiées des militants , des rebelles, des contestataires, mais de plus en plus des professionnels impliqués , investis, porteurs d'initiatives , qui prennent des risques dans leurs missions.
Les formes classiques de répression institutionnelle proviennent généralement d’une seule source, généralement hiérarchique.
Aujourd’hui, les acteurs ou agents de la répression peuvent être multiples et variés et ne se réduisent pas à la hiérarchie : cadres intermédiaires, gestionnaires, représentants des usagers ; par exemple, dans le cadre de l’Éducation Nationale, il n’est pas rare que les municipalités agissent également afin de mettre en cause, en difficulté ou écarter un directeur ou un enseignant indocile.
Elle peut tout autant provenir d’une majorité ou d’un petit groupe de collègues. Quand un danger ne provient plus de la seule source attendue, mais qu’il peut surgir de différents côtés, la peur est partout. Cela nuit à la création d’un véritable collectif et renforce l’isolement.
De toutes les expériences issues de mon parcours professionnel au sein du secteur social et scolaire, de tous les cas et personnes rencontrées, mises en difficulté, en butte de fait à une forme de répression, je retiens un point commun; dans toutes leurs différences la répression s’abat toujours en priorité sur les acteurs sociaux, qui font preuve, sinon d’innovation, en tout cas d’autonomie dans leur manière de travailler.
De fait, celui qui fait preuve d’indépendance ou d’autonomie, même s’il suscite souvent de l’admiration, voire une certaine popularité dans un premier temps, s’expose régulièrement à des formes de répression, non seulement de son activité, mais aussi contre lui-même, pour le danger qu'il représente.
Si la répression traditionnelle était caractérisée par une profusion de règles à respecter, aujourd’hui, aux côtés de celles -ci (toujours plus nombreuses), la pression est davantage exercée par des « normes », des habitudes, des standards de comportement qui recouvrent l’ensemble de l’activité enseignante.
Ces normes, non écrites, non officielles, ont d’autant plus de poids qu’elles sont intégrées par les individus, qu’elles semblent découler de l’expérience, du bon sens, et par le fait qu’elles sont volontairement adoptées par les acteurs, au moins passivement. Ne pas les respecter n’amène en théorie aucune sanction… hormis celle d’être considéré dans l’erreur.
Ces normes englobent tous les menus actes du métier ; elles prescrivent ce qui est souhaité ou interdit dans les modes de relations avec les publics, autant qu’avec les partenaires ou entre collègues .
Elles portent aveuglément sur des prescriptions (ce qu’il faut faire) ou des proscriptions (ce qu’il ne faut pas faire).
Ne pas les respecter, c’est se mettre à distance de ses collègues, c’est renoncer à une forme de solidarité automatique qui existe entre ceux qui les suivent.
Dès lors tous les problèmes, même ordinaires que peut rencontrer l’acteur social qui s’en libère, risquent fort d’être « interprétés », comme la conséquence logique de cette indépendance qui fait scandale.
Pour un enseignant, par exemple, accepter de se faire tutoyer par ses élèves, leur donner une liberté inhabituelle, ou tout simplement manifester trop de plaisir ou d’aisance à faire classe, entraîne souvent une forme de défiance de la part des collègues, qui se manifestera par un manque de soutien à la première occasion.
Il s’agit d’un effet que l’on pourrait presque qualifier de « Serpico », à l’instar du phénomène connu dans le milieu de la Police, quand un agent rompt avec les usages en cours dans son milieu professionnel et s'attire l'hostilité de ses collègues.
Une répression qui déborde dans la vie personnelle
Les facteurs d‘individualisation et de personnalisation des formes de répression institutionnels se développent actuellement et particulièrement depuis une vingtaine d’années.
Ces nouvelles caractéristiques poussent les acteurs engagés et exposés à ces formes de répression, à adopter eux-mêmes de nouvelles stratégies défensives, très différentes des modalités « de lutte » des décennies différentes.
Il ne s’agit plus de « gagner » collectivement, un bras de fer, ou de médiatiser un conflit dont on pourrait ressortir victorieux.
Pour se défendre, les professionnels exposés sont poussés à agir préventivement et dans la solitude. Il s‘agit de se protéger « par avance » de se rendre ou d’apparaître moins vulnérables. Il convient de « dissuader » l’institution de se lancer dans des actions répressives dont on n’attend plus de ressortir victorieux.
Ce n’est plus l’espoir de la victoire qui anime celui qui se défend, mais sa seule volonté « de s’en sortir ».
La violence réputationnelle : définition
La violence réputationnelle est une violence institutionnelle spécifique dirigée contre un ou plusieurs membres d’une équipe professionnelle en raison de comportements individuels, présentés comme moralement condamnables.
La spécificité de cette atteinte est, qu’au-delà de l’action ou des actions mises en cause, c’est la personne elle-même qui est définie comme « non fréquentable ». De ce point de vue l’attaque réputationnelle se veut « révélatrice ». Il s’agit de faire naître dans l’environnement professionnel l’idée que la personne n’était pas digne de confiance et qu’elle ne pourra plus l’être.
A mi-chemin entre vie professionnelle et vie privée, l’atteinte sur la réputation porte sur la personne en elle-même, dans ce qu’elle est profondément, dans sa « nature » qui aurait été dissimulée, puis révélée. En cela, l’attaque réputationelle est également « naturaliste », en ce qu’elle érige une conduite singulière, comme une caractéristique de la « nature » de la personne.
Les circonstances, le contexte, sont dans cette perspective, délibérément mis de côté, ignorés, afin de réduire l’analyse de la réalité et d’épuiser les circonstances par la dénonciation d’un individu.
Il ne s’agit plus de dénoncer le « harcèlement », « la violence », la manipulation, le détournement, la violence physique, ou des abus divers, mais de désigner un « harceleur », un « voleur », un « manipulateur », un « abuseur », un « individu violent », qui dès lors, verra son identité réduite à cette unique dimension.
De ce point de vue, le regain des attaques réputationnelles comme forme spécifique de la violence des institutions à l’égard de certains de ses agents, est favorisée par un climat social, qui fait la part belle à la pratique de la dénonciation.
La « dénonciation » comme pratique sociale, fait ainsi toujours partie du cérémonial de l’atteinte « réputationnelle », selon un scenario de plus en plus « huilé », socialement admis, qui protège le dénonciateur et expose la personne « dénoncée ».
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